

LE JUDAISME RABBINIQUE
Or, après la destruction du Temple de Jérusalem, l’absence même de ce lieu unique et sacré du culte, remet en cause la quasi-totalité des règles de la religion juive. Il est totalement impossible désormais aux juifs de respecter les lois de leur religion : pratiquer les sacrifices au Temple, accomplir les pèlerinages au Temple, assurer le service dévolu aux Lévi et aux Cohen etc ..
L’organisation de la religion juive va donc être modifiée, pour permettre sa survie même. Ce sera essentiellement l’œuvre de Rabbi Yohanan Ben Zakaï :
- Les trois prières quotidiennes que l’on pratique de nos jours, (prière du matin, de l’après midi et du soir) vont remplacer les trois sacrifices quotidiens, anciennement pratiqués au Temple de Jerusalem, et qu’il n’était plus possible d’assurer, faute de Temple.
- Les synagogues, de même, vont remplacer progressivement le Temple de Jérusalem. Ces synagogues ne sont d’ailleurs autorisées que ’’al tenai’’, c'est-à-dire, à titre temporaire, soit en fait jusqu’à la restauration définitive du Temple de Jérusalem, date à laquelle elles n’auront plus de raison d’être.
- Dans ces synagogues, le service quotidien du culte échappe à la caste des Cohen et des Lévi et revient désormais aux rabbins et aux membres de la communauté religieuse qui se regroupe autour d'eux .
- Enfin, les pèlerinages obligatoires au Temple de Jérusalem lors des fêtes juives (Pessah, Souccot, Chavouot) disparaissent. Ces fêtes seront désormais célébrées autour de la table du repas familial de chaque foyer juif et à la synagogue.
En définitive le judaïsme originaire, - totalement centré sur le Temple de Jérusalem -, laisse la place à désormais à un nouveau judaïsme rabbinique - basé sur l’étude, la loi et la prière -. C’est ce judaïsme rabbinique qui entreprendra l’immense travail de compilation de la Michna et du Talmud.
Les juifs tunisiens n’échappent pas à ce mouvement rabbinique, puisque les enseignements de rabbins tunisiens des 3eme et 4eme siècles après JC sont rapportés dans le Talmud.
Ainsi, Rabbi Itzhak de Carthage est cité dans le Talmud (Traité Berakhot page 29 a). De même les enseignements de Rabbi Abba de Carthage sont très souvent cités dans le Talmud de Jérusalem, (Traités Berakhot 4,3 / Bemai 5,2 /Kilaim 8,1 / Shabbat 7,2 /Yoma 1,3/ Taanit 2,2 / Ketoubot 5,1, Shevouot 3,1 etc.) Ainsi que les enseignements de Rabbi Hinena de Carthage qui sont également cités à maintes reprises dans le Talmud de Jérusalem, (Traités Shabbat 16 / Beça 1,6) et dans le Talmud de Babylone ( traité Baba kama 114b et Ketoubot 27.b etc..)
Le fait que ces sages soient mentionnés dans le Talmud dénote un haut degré d’érudition du judaïsme rabbinique tunisien. Celui-ci atteindra même un age d’or au 11eme siècle avec l’école de Kairouan, avant de connaître un déclin important à compter des années 1050/1060. Il ne ressurgira par la suite qu’à la fin du 15eme siècle, avec l’arrivée des juifs expulsés d’Espagne, sur le sol du Maghreb. (Voir Ale Hadass, éditions David Settbon, Kyriat Sefer)
Les Juifs d’Espagne avaient atteint, avant leur expulsion en 1492, un très grand niveau d’érudition religieuse, le judaïsme espagnol ayant été l’un des grands centres de rayonnement et de diffusion de la Kabbale et du Zohar. Toutefois, lorsqu’ils arrivent en Tunisie, les juifs d’Espagne trouvent sur place, c'est-à-dire chez les tribus juives, déjà présentes en Tunisie depuis près de 14 siècles, les vestiges d’un judaïsme extrêmement ancien, très différent du judaïsme rénové qu’ils pratiquent eux-mêmes.